TAÏWAN | Il a réussi à implanter le rhum antillais à Taïwan il y a déjà plusieurs années et ce ne fut pas de tout repos ! Zaka, 32 ans, vit à Taipei, la capitale du pays. Il encourage d’ailleurs à tenter une expérience professionnelle dans ce pays par le permis vacances-travail France Taïwan ouvert depuis août 2016. Le fondateur de Rum Runners, a accordé un peu de son précieux temps d’homme d’affaires à Caribexpat.com. Comme lui, rejoignez la communauté !

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© Zaka

Quand es-tu arrivé à Taipei et quel a été ton parcours ?

Cela fait 7 ans que je vis à Taipei. J’ai quitté la Martinique à l’âge de 19 ans pour effectuer une licence d’histoire à la Sorbonne à Paris. Ensuite j’ai décroché un MBA (Master in Business Administration) à la National Taïwan University à Taipei. Puis j’ai eu mes principales expériences professionnelles dans le commerce international et la gestion de projets entre l’Amérique Latine et la Chine. J’ai finalement décidé de travailler à mon compte en tant que consultant et j’ai créé Rum Runners. J’ai également été successivement président du Rotaract Club et du Rotary Club de Taipei.

Peux-tu nous en dire un peu plus sur Rum Runners ?

Depuis 4 ans, Rum Runners crée une route commerciale et met en place des projets entre la Chine, les Antilles et leurs régions. Le groupe s’est concentré sur l’agro-alimentaire et les spiritueux à partir de 2013.

Cela n’a pas dû être simple d’organiser la distribution de rhum antillais à Taïwan. Si tu devais évoquer deux difficultés et deux succès principaux, quels seraient-ils ?

En terme de succès, je dirai d’abord que la Martinique est sur une carte.  L’existence d’une France présente sur plusieurs continents échappe à beaucoup de monde. C’est par exemple le cas des agents des douanes avec qui j’ai dû me battre pour faire reconnaître l’origine des produits afin qu’ils puissent entrer sur le territoire. Il s’agissait aussi de faire reconnaître l’origine “Martinique”, la culture et la tradition d’excellence dans les spiritueux, la gastronomie et les arts de vivre. Ensuite, nous avons vendu plus d’alcool dans nos catégories que certaines multinationales. Nous avons aussi été pionniers dans la distribution de pisco et de cachaça à Taïwan.

A quoi ressemble la journée type d’un spécialiste du commerce international antillais à Taïwan ?

Les journées d’un entrepreneur ne se ressemblent pas surtout quand une structure et ses besoins évoluent. Les deux premières années, je dormais quatre heures par jour entre la mise en place de l’entreprise et le fait de devoir conquérir les clients un par un. Ce n’est que ces dernières années que s’est dégagée une routine, une fois la structure pérennisée. Je me réveille à 5h00 du matin, je lis pendant une heure, puis je finis toutes mes tâches à 11h00. Tout le reste c’est du bonus que j’utilise pour de l’associatif, du volontariat, du networking, du sport et l’écriture ! Je n’ai pas de salariés car les infrastructures ici me permettent de garder une structure “lean”. En d’autres terme, j’externalise un certains nombre de services (stockage, livraison, ventes, comptabilité etc…) facilement et pour un coût moindre.

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Qu’est-ce-qui est le plus marquant pour un antillais à Taïwan ?

En arrivant ici, je me suis dit : “c’est moche”. Je suis sérieux ! Vers la fin des années 1940 et la fin de la Guerre Civile en Chine, Chiang Kai Shek et le parti nationaliste chinois défaits se sont rapatriés sur l’île de Taïwan. Il y a eut entre 2 et 3 millions de réfugiés, soit la moitié de la population totale de l’île aujourd’hui ! Il fallait construire vite, dans un contexte de pauvreté, d’insécurité et de loi martiale. Avec le boom économique des années 1960 à 2000 (Taïwan étant un des fameux Quatre Dragons asiatiques) les grandes villes taïwanaises ont priorisé la fonctionnalité économique et industrielle au détriment d’un urbanisme contrôlé ou de l’esthétique. Ce n’est que depuis une décennie que Taipei devient l’une des villes les plus agréables et attractives d’Asie au niveau de la qualité de vie. Ensuite, un antillais à Taïwan ne doit absolument pas avoir peur de la foule et des scooters qui sont omniprésents ! Il faut savoir ce que l’on veut et être déterminé à trouver les personnes pour l’obtenir. Pour cela il faut parler la langue aussi vite que possible et se faire des amis locaux, ce qui sera plus utile que de rester entre expatriés. Je dirai donc à ceux qui veulent venir à Taïwan : 加油 qui se prononce “Jiayou” et 辛苦了, qui se prononce ”Xinkule”. Les deux mots veulent plus ou moins dire la même chose. Le 1er est positif  et veut plutôt dire “Pa ladjé !”.

Comment ont réagi tes proches quand tu as annoncé que tu partais vivre à plus de 15 000 kilomètres de Martinique ?

Il y a 7 ans tout le monde me demandait ce que j’allais faire là. Vu l’évolution de l’économie mondiale on ne me pose plus vraiment cette question. J’ai juste eu droit à l’habituelle confusion entre Taiwan et la Thaïlande ! Il est vrai qu’il y a une forte communauté caribéenne et latino-américaine mais il y a tout de même quelques antillais à Taiwan. Nous sommes un petit groupe et nous organisons un Chanté Noël chaque année par exemple !

Qu’est-ce-qui te manque le plus ?


Ce qui me manque c’est l’extrême créativité des Antillais. Dans tous les domaines, les individus les plus impressionnants et les plus complets intellectuellement que j’ai rencontrés jusqu’à présent sont des Antillais.

Pour conclure, en dehors de la distribution de rhum, quels autres échanges te semble-t-il opportun de développer entre les Antilles, Taïwan et la Chine ?

Au delà d’avoir développé des liens entre les Antilles et la Chine en créant Rum Runners, j’aimerais faire plus et développer les partenariats ou les investissements. Par exemple, je me souviens avoir suggéré dès 2010 des partenariats dans le domaine de l’agriculture et de l’horticulture. En effet, Taïwan est un leader mondial dans l’innovation et la commercialisation des cultures tropicales. Comme beaucoup d’efforts, cela est resté vain une fois les propositions soumises aux autorités. Nous sommes toujours dans une mentalité ou l’Occident domine et offre toutes les opportunités alors que l’on parle de pays qui excellent dans tous les domaines. Ce sont d’énormes acteurs de la croissance mondiale et ils participent énormément à la croissance des pays émergents. Les pays africains, latino-américains et nos voisins caribéens en profitent. C’est en ce sens que c’est un levier de développement que nous ignorons complètement.

 

Rédaction : Doris Nol pour Caribexpat.com 

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